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PACIFIQUE

mercredi 14 juillet 2004, par Admin

Nous y voilà, partis pour l’autre coté de la planète, son coté vraiment océanique, là où la terre s’efface sous l’eau, pointant ici et là la crête d’un volcan, cachant les monstrueuses cicatrices de ses failles sous des kilomètres d’eau, profonde d’un bleu sévère et forcément abyssal.

Départ des Galápagos accompagnés par les otaries, une raie gigantesque, des
baleines timides et des dizaines d’oiseaux. Puis la vie apparente s’efface,
quelques mercenaires pêcheurs mouillent des kilomètres de filets dérivants,
un aileron fend une vague, et nous nous retrouvons seuls avec les poissons
volants et les pétrels des tempêtes, grosses hirondelles noires et blanches
voletant en quête de plancton de surface à longueur de journées.

En fait, nous ne sommes pas vraiment seuls au début, puisque plus de dix
bateaux quittent le mouillage de Porto Villamil le même jour. Nous naviguons
deux jours avec deux d’entre eux, partageant les quarts de nuit, mais la
différence de vitesse entre les bateaux pour les uns, et le poids de la
responsabilité des autres bateaux pour les autres, nous font retrouver notre
indépendance. Au troisième jour, chacun suit ses options et son chemin, nous
gardons le contact par VHF pour s’informer du temps qu’il fait, de nos
performances respectives et du menu du jour. Dès le lendemain matin, nous
croisons un des bateaux partis de Villamil, petite conversation en anglais,
basée sur le hasard relatif qui permet à deux bateaux différents partis dans
des directions différentes de se retrouver trois jours et demi après au
milieu de l’Immense.

Puis la journée s’écoule dans le vide absolu, le vent est faible mais la mer
encore mauvaise d’une houle mourante qui vient bousculer le bateau par
moments, vidant ses voiles et le collant sur place dans un tonnerre de
tissus claqués et la plainte du gréement. Le capitaine est grognon, il n’
aime pas voir souffrir son bateau.
Par radio, on entend des échanges portant sur la météo, qui dit que le vent
est au sud du 5éme. C’est à une journée de route, alors on y va, en
diagonale pour ne pas trop s’écarter de la route directe. Nous avons prés de
6000 Km à parcourir, un peu plus de vent vaut largement un détour, puisque
la vitesse du bateau n’est alors qu’au tiers de ce qu’il peut atteindre. Il
faut aussi jouer avec le courant, qui atteint parfois un noud et demi. Quand
il nous pousse, c’est autant de milles gagnés, et la mer s’aplatit, dans le
cas contraire, les vagues deviennent courtes et pointues, se croisent en
tourbillons vicieux qui nous déroutent.
Des nuages se dessinent en fin de journée, barrant tout l’horizon. On se dit
que c’est gagné, puisque « chez nous », en Atlantique, nuage rime avec vent.
Hélas non, ici c’est différent, et sous les nuages, il n’y a carrément
presque plus de vent. Toujours secoués par la houle, dépités, nous lançons
le moteur pour nous déhaler vers les alizés promis. Coucher de soleil ciné
génique, lever de lune en compétition pour le même oscar, on est tout petit
la-dedans, excusez nous on ne fait que passer.

Lecture, pêche, cuisine, matelotage, occupations entrecoupées de siestes et
de longs moments de contemplation. Une nuit, la lune, pleine, éclaire de
façon inhabituelle des nuages déchiquetés, nous offre un arc en ciel
nocturne, puis se couche, juste avant l’aube, comme sur un négatif
flamboyant. Lever du jour rose et bleu, cumulus tourmentés et déchirés,
horizon gris sale, rideaux accrochés aux nuages, je connais cela, le vent
devrait souffler. Nous passons la journée sous génois seul, tangonné pour
mieux le présenter au vent. Ce n’est pas la tempête, force sept, mais en
quelques heures ça réveille les vagues qui viennent secouer le bateau.
Heureusement la vitesse compense l’inconfort. La nuit revient, avec un
soupçon d’accalmie, la mer est moins chaotique, le pilote automatique fait
de son mieux et il ne reste plus qu’à s’asseoir prés de la descente et se
laisser fasciner par le spectacle. Les vagues galopent vers le bateau, le
soulèvent, nous partons en surf dans l’écume, roulant d’un bord sur l’autre.
Puis le bateau se pose dans un creux, une autre vague prend la relève, et
nous voilà à nouveau projetés en avant dans une glissade vibrante. Bruit et
fureur, puissance brutale, le bateau fait l’anguille et se faufile entre les
crêtes, de l’une à l’autre.
La vie à bord devient fatigante, il faut s’accrocher même pour dormir, tout
ce qui n’est pas bien calé lévite à la première occasion, on se cogne et on
râle un peu. Mais Gaëtane fait du pain et des tartes au poisson bien sure,
les enfants leurs devoirs, et je fais avancer le bateau, comme chaque jour.

Passée la perturbation, le vent est retombé, et ne sais plus d’où il vient.
Il faut supporter les vagues qui arrêtent le bateau dans des mouvements
désordonnés et nous font crier : ’’lâchez nous la quille’’ aux créatures
qui jouent avec nos nerfs, là- dessous. Nous devons sans arrêt modifier le
cap ou le réglage des voiles pour conserver un peu de vitesse, fini le
farniente. Les multiples calculs que nous avions fait pour trouver la date d
’arrivée passent aux oubliettes. Néanmoins, nous sommes en régate avec un
cata de quinze mètres qui est parti deux jours après nous, avec à son bord
des copains et copines de Quentin et Bérenger. Impensable donc de finir au
moteur ou de laisser le bateau brouter des moutons en attendant des vents
meilleurs. Nous nous en sortons bien avec une moyenne proche de six nouds.
Quatorzième jour, nous rattrapons un petit voilier, parti quatre jours avant
nous, et sommes obligés de nous dérouter pour contourner un Longliner en
train de relever ses palangres. Nous pensons à ces quelques équipages qui ne
veillent pas la nuit, et vont dormir en confiant leur vie au pilote. Sans
commentaire. Nous redoublons de vigilance, d’autant plus qu’à quelques jours
de l’arrivée, le risque de croiser d’autres bateaux va s’accroître.
C’est la dernière droite, le vent mollissant nous permet de sauver notre
place dans la régate avec le cata, nous ralentissons le dernier jour pour
arriver au petit jour à la Baie des Vierges, Sur Fatu Iva, la plus sud des
Marquises, un des plus beaux mouillages du monde.
19 jours et cinq heures, 2933 milles, atterrissage en douceur de la planète mer
à la planète terre.

MARQUISES

Fatu Hiva, première escale.
C’est plus beau que dans les guides, des piliers monumentaux encadrent un
canyon verdoyant balayé par de puissantes rafales descendues des vallées
attenantes. L’accueil de ce village de deux cent habitants est plus que
chaleureux, malgré le policier municipal qui veut nous imposer d’aller
déclarer notre arrivée au commissariat, sur Hiva Oa, à une journée de là.
Cela s’arrange avec une autorisation municipale, qui nous donne trois jours
de tranquillité, au-delà desquels le policier s’accoutume à notre présence
et cesse de rêver d’expulsion.

Nous échangeons des fruits et de la viande contre diverses bricoles, et
sommes dés le premier jour invités à un pique nique le dimanche suivant.
Plongées dans les eaux cristallines malgré une pellicule de plancton en
surface. Plongée en forêt pour atteindre une chute d’eau magnifique et sa
piscine naturelle, pêche aux chevrettes (crevettes d’eau douce) dans la
rivière.
Retrouvailles avec les bateaux rencontrés aux Galápagos, dont le fameux
catamaran et ses mômes, plus un autre de 18 mètres sur lequel nous sommes
invités à dîner. Steve est américain, Maria est cubaine, et nos enfants se
connaissent. Mélange tonique dans un intérieur plus que cosy, parfois la mer
ne connaît pas la lutte des classes.
Traversée rapide et désagréable vers Hiva Oa, l’île de Gauguin et Jacques
Brel. Décevante après la fascinante baie de Vierges. Mouillage glauque et
houleux, village très éloigné, très fréquenté par les touristes, premiers
contacts moins chaleureux, moins faciles qu’à Fatu Hiva. C’est tout de même
très beau, on trouve à peu prés de tout, on pêche encore des chevrettes, et
des petits requins sous le bateau, la nuit. Les habitants nous prennent
facilement en auto stop, et sont alors diserts et souriants. La postière
vaut le détour pour sa gentillesse, mais le patrimoine ne brille pas par sa
mise en valeur. Ici, les vaches à lait sont bien Gauguin et Brel, foin de la
tradition Maori. Sans le mouvement culturel commun aux six îles, celle-ci
semblerait bien oublier ses origines. Nous grimpons à la stèle de Jacques,
beau panorama, et admirons un peu plus tard la sobriété extrême de sa tombe.
C’est la fête de la musique, les groupes locaux se donnent à fond dans le
style américano-tahitien, sympa pour l’ambiance mais moins pour les
oreilles.
Nous retrouvons encore d’autres bateaux arrivés des Galápagos. Pour Gérard,
c’est sans son bateau, resté accroché à la pointe de l’île pour une erreur
de navigation. Seul à bord, il n’a sauvé que ses papiers et un peu d’argent,
et a escaladé dans la brousse pendant deux jours, pieds nus, sans
nourriture, gelé la nuit, cuit le jour, avant d’être sauvé par deux pêcheurs
de chevrettes, endormi à bout de forces prés d’une rivière.

Ce retour à la civilisation devait signifier retrouvailles internet avec
notre fan club et nos familles. Hélas, le web fonctionne ici aussi bien que
le métro à Groix, même à l’hôtel de luxe qui surplombe le port, où l’on se
fait dévorer par les moustiques pour 10 euros de l’heure devant l’écran d’
un PC néandertalien, sous le regard avachi de l’hôtesse d’accueil cinq
étoiles.
Les bungalows sont magnifiques et la piscine d’altitude tentante, mais les
tarifs expliquent que les clients ne se marchent pas dessus. Promotion
permanente pour les « gens de bateaux », comme on nous appelle ; dîner, nuit
et petit dej pour une centaine d’euros, soit 50% de réduction. Avec les
moustiques ?

Tout prés, il y a l’île de Tahuata, et un petit village réputé pour l’
accueil de ses habitants. Nous avons hâte de quitter le stress urbain et
abordons le canal du Bordelais tout proche avec appréhension. On y parle de
vagues énormes liées aux courants. Rien de tel ce jour, malgré de gros
grains noirs de pluie et de vent qui nous rasent de prés. Sous le vent de l’
île, les rafales succèdent aux calmes. Le premier mouillage, plage de sable
et cocotiers, est « saturé » par au moins cinq bateaux, le second est blanc
d’écume à cause du vent furieux qui secoue la vallée. Le troisième, nous le
manquons, presque invisible venant de la mer. Poursuivant pour nous assurer
de sa localisation, nous passons le cap de la baie, et une violente rafale
nous prend par surprise. Le vent tourbillonne, nous empannons brutalement,
le palan d’écoute explose, la bôme s’écrase sur le bas hauban, le vit de
mulet s’en sépare, et le tout se retrouve pendouillant lamentablement dix
secondes plus tard, grand voile déchirée. On affale, un peu secoués, et
revenons au mouillage raté au moteur. A moins de cent mètres, le village se
laisse voir, parfaitement dissimulé par la végétation. Nous jetons l’ancre
devant le petit cimetière, tout est calme, la pression retombe, l’eau est
limpide, l’immense falaise qui nous surplombe est un écrin vert et
accueillant.
Ici aussi, les rencontres sont faciles, la rareté des visiteurs laisse aux
habitants la patience de leur sourire et de leur parler, un chemin vert et
séculaire nous promène en bord de cote, longeant un village entièrement
construit sur d’antiques plate-formes de pierre volcanique. C’est le premier
endroit ou nous sentons à ce point l’ancienneté de la culture marquisienne
émergeant dans le présent. Il y a peu de voitures, une ou deux, et deux
engins de chantier pour mettre les bateaux à l’eau et transporter les colis
de l’Aranui du quai au village.
L’activité principale du village est la sculpture, sur bois et sur os.
Hapatoni est réputé pour cela, très justement. On récolte aussi, comme dans
toutes les Marquises, Nonis et citrons, qui partent pour Tahiti. Les
innombrables cocotiers permettent de produire copra, Monoï, lait de coco, et
on en tresse les fibres en cordelettes qui servent à tout. Magnifique
travail de tressage, qui demande une patience que la productivité moderne ne
saurait supporter.
La partie de boules tous les jours après le travail, vers seize heures,
réunit au moins la moitié du village, on cause, on sculpte en bavardant, en
regardant les boules voler au milieu des rires et de tirades pour nous
incompréhensibles. La langue Marquisienne n’est pas un accessoire, aux
Marquises, on parle marquisien, et le français y est allègrement massacré,
dans un roulement de R nonchalants.
On se retrouve après le dîner sur le quai, pour pêcher quelques poissons et
encore bavarder. La télé n’a pas encore imposé son voile, les médias n’ont
pas encore étouffé la vie sous leur épaisse couverture.
Nous devions y passer deux jours, la semaine s’écoule à grand pas, longue
marche au village voisin, Vaitahu, par une route de montagne dure aux
jambes mais magnifique. Plongées avec les gars de Hapatoni au flanc de
falaises vertigineuses s’évanouissant dans la nuit abyssale, grottes sous
marines, requins. Il faut aussi réparer des moteurs des pirogues et speed
boats locaux, et les dégâts sur Horus à notre arrivée (c’est maintenant
mieux que du neuf)
L’Aranui arrive le dimanche suivant, nous permettant de découvrir l’
exploitation touristique des ressources locales. Ils s’en sortent bien, les
marquisiens. Une barge débarque 80 aventuriers blafards, coiffés de fleurs
et caméras en bandoulières, souriant aux enfants qui leur chantent des mots
de bienvenue. On les dirige vers un faré communautaire ou sont exposées les
très belles sculptures locales. Ils se jettent dessus, on emballe, on
encaisse. Ils ont ensuite droit à un petit spectacle, goûtent les
spécialités locales, et au repas dans des assiettes en plastique, au son des
chanteurs du village. « Petit papa Noël », « en descendant de la montagne »,
« compagnons de la table ronde », le répertoire est celui que les
marquisiens apprennent à l’école, accompagné à la guitare et au tambour.
Sans commentaires.
La journée des touristes se termine bien vite, quelques uns d’entre eux se
baignent et se promènent en bord de village, la plupart sont retournés à
bord. Que ramènent-ils de leur voyage ?
Nous aurions pu y rester des mois, mais l’envie de retrouver nos amis de
Nuku Hiva est plus forte. Nuit de nav peinarde, relevée par la
spectaculaire entrée d’une météorite dans notre atmosphère. Dix minutes de
spectacle, elle semble venir sur nous, dans un panache de lumière rageur,
puis se désintègre progressivement. Extinction des feux, seul le nuage créé
par la traînée nous dit que nous n’avons pas rêvé. Au matin les hautes
falaises de Nuku Hiva émergent dans l’aube, les oiseaux par milliers
survolent les bancs de bonites, mais les lignes de traîne restent vides.

Nuku Hiva
Jumelle de Groix, depuis le festival du film insulaire en 2002. Souvenirs de
ces promesses d’échange dans une ambiance de fête, de solennité et de
grandes idées. Souvenirs de ce mois passé ici il y a un peu plus d’un an
comme « prof » dans le cadre de la construction d’une Pirogue à vocation
culturelle, de l’accueil bordélique mais immensément généreux. Souvenir de
toutes les personnes que nous y connaissons et aimons malgré l’éloignement.
Une petite inquiétude me taraude, nous n’apportons que nous-mêmes et
quelques rares cadeaux à ces jumeaux si éloignés. Il me semble que c’est
peu, il faut nous sortir du contexte « jumelage » Nous venons voir des
amis, point barre.
De fait, on ne nous a pas oubliés. Les premiers jours se passent à retrouver
les un et les autres, aller à la pêche du matin (trois heures) avec l’un d’
entre eux, dîner ou prendre un café, ou bavarder, avec les autres. Hier
soir, spectacle de danses, pas spécialement pour les touristes qui sont ce
soir très peu nombreux. Deux groupes se succèdent devant un jury, nous
retrouvons la puissance énorme des tambours et la force des danseurs, les
voix étranges de femmes, la rage des chefs de danse. C’est fort,
impressionnant malgré les imperfections techniques(point de vue ridiculement
occidental), les Européens n’auraient jamais pu imposer ici leur culture
sans leurs armes et leur perversité (autre point de vue n’engageant que moi)
Ceux qui ont vécu cela à Groix me comprendront mieux que les autres. Le
spectacle est ici chez lui, encore plus fort que lorsqu’il s’exporte.

Les nouvelles du Jumelage nous arrivent petit à petit. Rien n’a bougé à
Groix malgré les relances et projets d’ici. L’institutrice qui a monté le
projet pendant deux ans, qui est venue deux fois le présenter à Groix, est
dépitée. Les petits correspondants de Nuku Hiva ne verront pas les leurs à
Groix, alors qu’ils sont accueillis à bras ouverts par Ouessant. C’est la
honte, où sont les promesses, à quoi riment le Tiki de l’Esméralda, la
sculpture commémorant la mort de Lucien, et une rue Kimitété chez nous si
nous ne savons renvoyer que du silence à leurs propositions ?
Fraterniser avec eux, puis négliger ainsi notre engagement d’encourager les
échanges est méprisable. Cet esprit d’ouverture, d’échange, d’intérêt pour
les autres cultures, a t’il un sens chez nous ?
Pourquoi les deux initiateurs majeurs de ce jumelage n’en sont-ils plus les
piliers et les moteurs, vu les liens privilégiés qui les attachaient aux
marquisiens ?

Heureusement, Groix, où nous sommes toujours des étrangers, ne déteint pas
sur nous, et les échanges débarrassés de toute représentation se passent
pour le mieux.

Réveil ce matin sous la brume, on se croirait en Irlande, dimanche de
flemme, vivent les vacances et à bientôt pour d’autres nouvelles.


Baie des vierges


Fatu Hiva, on y était...


Papotage


Baie D’Atuona à Hita Hoa

Commentaires

  • Ce n’est pas une réponse à cet article, c’est juste le coucou d’une famille Raynal admirative qui vous souhaite tout le meilluer... Salut les poteaux. À bientôt

    Patrick&Arlette

  • Nuku Hiva, le 19 juillet 2004.

    A l’attention des membres Comité de Jumelage de Groix, de Monsieur le Maire et du Conseil Municipal de Groix, et pour copie aux personnes intéressées de Nuku Hiva.

    En 2001, Groix avait plus que jamais tourné ses yeux vers le large, à l’occasion du premier festival du film insulaire, en posant les bases du jumelage avec Nuku Hiva.
    Hélas, une fois la fête passée, l’élan fraternel s’est peu à peu dissipé, malgré quelques moments forts . La mort de Lucien Kimitété a rappelé brutalement aux groisillons le charisme du meneur d’homme qu’il était, et nous avons ressenti la cruauté de sa disparition. Une rue à son nom et la plaque commémorant sa disparition ancrent physiquement à Groix les promesses faites lors de la cérémonie du jumelage.
    Dans une moindre mesure, la participation de groisillons à la construction de la pirogue de Nuku Hiva , l’équivalent local de nos vieux gréements en matière de conservation de nos cultures, a été un exemple du genre d’échange qu’un jumelage peut générer.
    De manière encore plus discrète, mais pas moins intense, l’hébergement chez l’habitant du groupe de danses marquisien venu à Groix a laissé à nos hôtes un souvenir encore très fort aujourd’hui, j’en témoigne aujourd’hui et sur place, à Nuku Hiva.

    Lucien Kimitété était un homme rayonnant. Que les groisillons n’aillent pas s’imaginer qu’il soient les seuls « jumeaux » des marquisiens de Nuku Hiva.
    Lucien avait pris des contacts en d’autres endroits de la planète, en Amérique Latine, en Nouvelle Calédonie… A sa manière, il rendait aux Marquises leur position centrale dans le monde polynésien, et créant des liens par dessus les Océans. Nous n’avions probablement pas saisi le coté planétaire de cette manœuvre lors de sa venue à Groix, mais s’en rendre compte aujourd’hui, c’est tout de même entrer dans une vision du monde autrement plus vaste que celle que nous propose, par exemple, les infos du journal télévisé.

    Où en sommes nous aujourd’hui ?
    Une chose est sure ici, en Mairie de Nuku Hiva, c’est que c’est à Groix de prouver son intérêt pour le jumelage.
    Pas moins de quatre délégations Marquisiennes à caractère officiel se sont rendues à Groix, contre zéro dans l’autre sens.
    Le voyage d’une classe d’enfants Marquisiens à Groix, organisé depuis deux ans aux marquises, présenté plusieurs fois par son organisatrice à Groix, annulé fautes de réponses coté groisillon
    Malgré plusieurs contacts par mail, aucune réponse de la mairie de Groix aux questions de Nuku Hiva depuis plusieurs mois.

    Il existe pourtant un comité de jumelage à Groix, au sein du quel on trouve l’initiateur du jumelage. Il y a pourtant au conseil municipal de Groix plusieurs personnes qui connaissent des gens de Nuku Hiva, pour les avoir hébergé lors de leur séjour.

    Dans un peu plus d’un mois, le prix Lucien Kimitété sera remis à l’occasion du festival du film insulaire 2004.
    On apprend par ailleurs que des promesses faites aux marquisiens par des groisillons ne sont pas tenues. Participations financières, envoi de matériel vidéo, échanges de bois sculpté, de photos.
    Ceux qui ont promis se reconnaîtront, je l’espère, car je suis persuadé que les marquisiens attachent plus d’importance au respect de la parole donnée qu’à une récompense portant le nom du meilleur d’entre eux accordée à un inconnu à l’autre bout du monde.

    En cette époque marquée par le manque d’idées au niveau planétaire, la main ouverte des marquisiens est pour les groisillons une belle occasion de porter leur regards au-delà des petits tracas quotidiens.
    Les Marquises ont une histoire formidable, terriblement sombre mais porteuse d’espoir, Nuku Hiva est une île, qui ressemble parfois comme une sœur à Groix. Le projet de notre jumelage, au delà des échanges précédents, a de fortes raisons d’être.
    S’il semble à ce stade prétentieux de tenter d’énumérer ces raisons d’être, on peut humblement se contenter de correspondre entre nous, pour construire petit à petit les liens qui peuvent nous rapprocher. On peut aussi simplement se fier à l’instinct qui a décidé les maires des deux communes à signer ce pacte, et laisser le temps amener les occasions de resserrer ces liens, en profitant de chacune de ces occasions, au lieu de les gâcher comme cela vient de se faire avec les enfants de Nuku Hiva.

    On ne peut pas rester muets comme à l’heure actuelle, à moins d’officialiser cette fois le désintérêt de Groix pour ce jumelage.

    Grâce au hasard et à la chance qui m’ont permis de venir deux fois à Nuku Hiva, je peux concrètement mesurer ce que le jumelage peut apporter de positif à chacun d’entre nous. Poursuivre sa construction, c’est donner cette chance à nos deux îles, cela vaut bien quelques efforts.

    Alexandre de Roquefeuil

    • Bonjour, je m’appelle TEIKITOHE Chantal originaire de NUKU-HIVA.
      Je voulais juste vous remerciez pour tout le bien que vous portez sur NUKU-HIVA car je suis moi-même de cette île que j’aime.

  • Je connaisais vos talents de marin mais je découvre aujourd’hui vos talents d’écrivain et de témoin. Je suis assidument votre périple en attendant de pouvoir dans quelque temps suivre vos traces .
    bravo pour tout et à bientot sur le web pour la suite

    Amicalement

    Gilles Romieux

  • Alex ,

    Vous avez fait une superbe balade dont vous m’avez déjà parlé à Kerlard en août dernier !
    Ceci nous a donné envie de retourner dans cette région du globe ou nous sommes déjà allés en 2000 mais pas aux Marquises .
    Mon épouse et moi n’irons pas aux Marquises en bateau comme vous .. je suis trop piètre marin .. mais nous y serons quand même en mai 2006 .

    A bientôt probablement à Groix .. c’est plus proche !

    D MAINGAUD