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Le Grand Carnaval

jeudi 4 mars 2004, par Admin

Trinidad, premier mars, déjà.
Notre dernier courrier nous ramenait en Martinique, on nous avons passé plus de quinze jours. Une nouvelle escale à st Pierre, qui nous a permis de vraiment l’apprécier, grâce, entre autres, à une visite guidée avec un guide pas ordinaire, vraiment passionné, qui nous a décrit la magnifiscence et l’éradication subite de la ville (en 1902).

Je vous passe l’histoire, elle se lit dans tous les guides et est passionnante, à cette exception prés ; Peu après leur arrivée, les premiers colons, qui tombaient comme des mouches sous le climat tropical, on réussit à se rapprocher des indiens caraïbes qui vivaient là, pour finir par les faire travailler pour eux. Les conditions de travail étant alors ce que vous pouvez imaginer, (pas de syndicat, pas de délégué du personnel, tout ça …)les Caraïbes se sont révoltés et on commencer à bouffer des colons en représailles. Début de conflits tournant forcément à l’avantage des colons, grâce à leurs armes. Fin du film ? Non. Vaincus, les caraïbes se sont réunis pour un ultime festin, se sont crevé les yeux et jetés a la mer, non sans avoir au préalable maudit les colons et annoncé la colère de la montagne, qui les vengerai un jour…. On comprend mieux l’impression fataliste qui se dégage aujourd’hui de st Pierre. L’ancien ’’Petit Paris des Caraïbes’’ ne se relève pas de sa malédiction.

Nous passons une matinée suspendus à flanc de montagne en longeant le ’’canal des esclaves’’. C’est un aqueduc maçonné qui amenait de l’eau à une sucrerie, jolie ballade à l’horizontale, surplombant la vallée du Carbet, magnifique. Des crabes jaunes s’enfuient à notre passage, des poissons minuscules se prélassent à l’ombre de fougères miniatures vert tendre, et l’eau serpente paresseusement à fleur de falaise.

Retour au Marin sous un grain monstrueux, le taud de cockpit s’envole, nous naviguons à six nœuds au prés serré sous trinquette arisée et grand-voile à trois ris. Pas de panique a bord, l’équipage est rodé, désormais. Bientôt arrivent Patrice, Dominique et les filles, directement de GROIX même, chargés de nouvelles et de paquets. Tout cela nous fait passer deux sacrées bonnes journées, on va les chercher dans leur patelin avec le bateau pour une journée en mer, baignade, apéro, pique-nique, sieste, crevant !

C’est pas tout ça, faut partir. Ce départ de la Martinique est une nouvelle page du voyage, nous ne toucherons plus de territoire francophone avant les Marquises. On s’arrange pour passer de jour le long de Ste Lucie et St Vincent, ça vaut le coup d’œil, même si cela ressemble aux autres Caraïbes. Deux nuits à Bequia, charme british à dreadlocks, encore des retrouvailles avec des potes, et donc de bonnes soirées. Enfin, le lendemain, cap sur les TOBAGO CAYS. Je l’écris en gros parce que là, la description sera pauvre. Les glénan sous les tropiques, en gros, en plus grand, avec des Blacks rigolards qui nous proposent Langoustes (trop chères), fruits, légumes et pain frais tous les jours. On sera à la bourre pour Trinidad, tant pis, on est tellement bien qu’on y reste, encore un peu. Pour finir on sort de la barrière de corail pour aller prendre le thé à Morpion, vingt mètres carrés et un parasol.

C’est la nuit, cap sur Trinidad. Nav de toute tranquillité, arrivée au matin en vue des Bouches du Dragon. Cent cinquante mètres entre les deux murailles qui forment le chenal puis des baies immenses, puis le golfe de Paria, trente cinq nautiques de large sur soixante dix, c’est le jardin de trinidad, plein de poisson et plate formes pétrolières.
Nous mouillons à Chaguaramas, des bateaux de tous les genres, du cargo au dériveur. Après les tracasseries d’immigration (non madame, nous ne transportons pas de passagers clandestins, pas de bauxite, pas d’explosifs), on retrouve les amis, dont certains sont au sec dans une marina privée, avec piscine, resto pas cher (deux euros le repas de midi, cuisine indienne de premier choix), et libre accès à tout le monde. Vu la couleur de l’eau, d’un vert bouteille pas du tout engageant, la piscine est un vrai bonheur.

Le temps de se poser, on est déjà au carnaval. Défilé monstrueux, jusqu’à mille personnes par thème, des semi remorque chargés de sono, des déguisements ahurissants, on s’en explose les yeux et les oreilles. Contrairement à ce qu’on entend partout, pas le moindre sentiment d’insécurité, de jour. Après deux jours de soca danse, Je fais la clôture avec quelques voisins de ponton, le soir, sans les enfants. Rien que du plaisir !

On danse avec des grosses black qui nous envoient valser à coups de hanche de l’autre coté de la rue, on cause sans soucis avec ceux qui s’étonnent de voire des blancs à cette heure dans le défilé. Au retour à la marina, nous plongeons dans la piscine avant d’y jeter les quelques anglais venus goûter la fraîcheur nocturne sous la tonnelle attenante. Il faut dire qu’a cause de la chaleur de la journée, on avait bu quelques bières. Ca désinhibe, ce truc, même les anglais se marraient comme des baleines. Du coup on a finit leur whisky et on a signé un traité de paix entre la France et l’Angleterre.
Bon, la musique ne mérite pas qu’on s’y attache, la danse tient plus du piétinement que de la samba, mais c’est sacrément entraînant et on a tous passé deux journées inoubliables.

Pour faire sérieux après tout cela, on fait un grand tour en taxi dans l’île, découvrons par hasard une chute d’eau au cœur de la foret ou nous plongeons tous, naturellement, marchons au milieu de bouquets de bambous géants (vingt mètres de haut et plus) et d’arbres monumentaux aux racines interminables, entourés de cris d’oiseaux étranges et inconnus.

Trinidad, une escale à prolonger, à l’occasion. Mais le temps passe, Panama nos attend, avec sur le chemin des îles pleines de promesses, et de noms évocateurs ; Chacachacare, Testigos, Margarita, Bonaire, SanBlas…

Largue partout, on est reparti.

Alex