Tempête dans un verre de Rhum

Communiqué du maire de Groix Eric REGENERMEL concernant une récente émission diffusée sur la station de radio Europe 1.

Lors de l’assemblée générale des maires des îles du Ponant, une journaliste d’Europe 1 est venue sur l’île aux Moines faire un reportage sur la vie dans les îles bretonnes. Je lui ai accordé 20 minutes d’interview sur les nouvelles technologies de communication, le cybercentre et le haut débit Internet. D’autres maires des îles ont été enregistrés à cette occasion.
A peine de retour sur le quai de Port Tudy, la même journaliste m’attrape et me demande mon avis sur les actions du centre de loisir et sur les problèmes d’alcool chez les jeunes. Je réponds sans malice en cinq minutes dans le vent et sous la pluie.
Ce qu’Europe 1 a diffusé ensuite est typique d’un grand nombre de journalistes : partant du principe que les trains qui arrivent à l’heure n’intéressent personne, ils donnent dans la caricature pour faire de l’audience. A l’échelle de Groix, ce fut plutôt réussi !

Bien sûr Alice Michaud et moi-même avons prononcé les mots qui ont été diffusés, ainsi que les jeunes dont certaines phrases étaient provocatrices. Mais si la jeunesse n’est pas provocante, qui le sera ?

Bien sûr ces mots ont fait l’objet d’une sélection et d’un montage dont le seul auteur est la journaliste d’Europe 1. Deux jours de travail résumé en 3 minutes de diffusion : aucune subtilité d’analyse n’est possible.

Bien sûr Groix n’est pas une plus grande victime de l’alcoolisation des jeunes que la Bretagne, la France et même l’Europe ! Je ne peux cependant me contenter d’ignorer ce problème qui me touche de près en tant que maire, médecin, et père d’adolescents. (Je ne pense pas un instant que mes propres enfants soient à l’abri de ces dangers)

Pour ma part j’assume mes propos sur cette radio. Ils sont en concordance avec plusieurs discours que j’ai prononcés sur ce sujet.
Si Alice Michaux et moi-même nous sentons « responsables » c’est par professionnalisme. J’ai été confronté à trop de morts lentes ou violentes, et trop annoncé de décès à des familles détruites pour penser que l’alcool et la drogue seraient des questions tabous. Trop de politiques évitent ce sujet comme la peste par peur de perdre des voix ! En cela je ne me sens pas du tout un « politique. »

Les enseignants de Groix, eux-mêmes professionnels et responsables, savent décoder les médias. La prévention des dépendances fait partie de leur formation. Ils peuvent saisir la balle au bond pour parler de cette émission avec leurs élèves.
Mais si les parents n’en parlent pas avec leurs enfants, personne ne pourra le faire à leur place. La parole des parents et la première entendue des enfants, même lorsqu’ils ont trop grandi pour leur laisser croire qu’ils les écoutent encore.

L’image de Groix en a-t-elle souffert ? Peut-être. Mais voulons-nous seulement donner à voir un paradis de carte postale ? L’île compte des jeunes et c’est heureux, ils ne sont pas différents de ceux du continent. Nous tentons tous de les aider dans le difficile passage de l’adolescence. Ce n’est pas les aider que de les mettre au pilori pour avoir dit ce que personne ne voulait entendre.

E. Regenermel
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