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Caps Haïtiens au Festival du film insulaire

vendredi 27 août 2004, par Visiteur

Depuis l’ouverture du Festival international du film insulaire, mercredi soir, et la projection de "Jean Dominique, The Agronomist", le film de Jonathan Demme sur le journaliste de radio haïtien assassiné, Groix et Haïti ne font plus qu’un. Des liens se lient au gré des journées, des projections, des rencontres.

Haïti et la Bretagne

La Bretagne va venir en aide à Haïti en matière d’agronomie. C’est ce qu’a annoncé, jeudi, le président de Région, au cours d’un déjeuner à Groix. Rappelons que l’école d’agronomie de Port-au-Prince a été détruite cette année". Comme a insisté Michèle Montas, la veuve du journaliste assassiné Jean Dominique, cette aide devra être "accompagnée de changements de structures, sinon, ça ne servira à rien".

La région se sent proche des Caraïbes, riches en littérature, en création musicale et audiovisuelle", a ajouté Jean-Yves Le Drian. Lequel a annoncé également, lors de son passage à Groix, que "la Bretagne doit jouer la carte de l’audiovisuel et du cinéma. Nous devons créer un pôle image en Bretagne pour accueillir des réalisateurs et des sociétés de production".
Autant d’annonces qui ont été relayées par les médias locaux, comme Le Télégramme, Ouest France et France 3 mais aussi par RFO radio et télévision.

Haïti, la presse et la politique

La salle de projection de l’Esmeralda a rassemblé une bonne cinquantaine de festivaliers, mercredi en fin d’après-midi, pour un débat intitulé "Haïti, ses libertés, ça presse !" Michèle Montas, Robert Philomé, journaliste haïtien en exil et Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, ont tenté de comprendre et d’expliquer la situation en Haïti, en fonction de son passé, de son histoire politique, des "échecs de gouvernance", selon l’expression de Michèle Montas. Pour Robert Philomé, "il ne faut pas rater la transition ; il y a actuellement un mouvement qui tend à créer cet Etat haïtien dont nous avons besoin". Tout en sachant que les autorités intérimaires haïtiennes, épaulées par les Nations unies, affichent certains signes inquiétants d’instabilité et de corruption.

Pour Robert Ménard, la presse a un grand rôle à jouer, consciente que la plus grande menace est "l’indifférence du monde ; que le monde n’en ait rien à foutre ; que s’instaure une espèce de lassitude". Autant de raisons pour que le Festival de Groix mette cette année l’accent sur ce pays, l’un des plus pauvres du monde, qui fut la "perle des colonies françaises".

Haïti et le cinéma

Six films étaient au programme de la soirée spéciale Haïti, jeudi, au Cinéma des Familles. Charles Najman était présent avec deux films, dont l’un, "Haïti, la fin des chimères", a été tourné les tout derniers jours du pouvoir de Jean-Bertrand Aristide, au moment des commémorations du bicentenaire de l’indépendance (1er janvier 1804).

Le réalisateur a souhaité, sans commentaires, "laisser les Haïtiens raconter leur histoire". C’est ainsi que l’on découvre doute, découragement et désespoir de l’homme de la rue, tandis que dans des discours grandiloquents, le président - aujourd’hui en exil - s’adresse au peuple en utilisant la redondance et la répétition, une méthode éprouvée par les dictateurs, ces "caudillos", selon les termes de Robert Ménard, "dont il ne faut pas sous-estimer le poids", en Haïti et ailleurs.

Haïti et les Haïtiens

Journalistes en exil, chanteurs (Bob Bovano), conteurs (Mimi Barthélémy) haïtiens ont mis le cap sur Groix pour le Festival. "Je n’ai jamais autant retrouvé la Caraïbe comme ici à Groix", a lâché Carole, de l’association "Gens de la Caraïbe".

Quant à Michèle Montas, elle doit repartir vendredi. Avec l’espoir de retrouver ses bagages, qui étaient restés en souffrance quelque part entre New York et Paris. Ce qui ne l’a pas empêchée de profiter pleinement du festival, entre débats, interviews et projections. Même si le portable restait dans sa chambre d’hôtel : "Je suis en vacances !", a-t-elle dit en arrivant.

Commentaires

  • Mini- lueur d’espoir pour les Haïtiens ?

    CARAÏBES Pour conforter la pacification à l’approche des élections générales qui ont été fixées au 20 novembre après avoir été repoussées à deux reprises
    La France accentue son aide à Haïti

    Port-au-Prince : de notre envoyé spécial Tanguy Berthemet Le Figaro
    [12 septembre 2005]

    Haïti s’apprête à vivre l’une des périodes les plus cruciales de son histoire passablement agitée. Brigitte Girardin, le ministre délégué à la Coopération, de retour, hier, d’un voyage de deux jours dans l’île, ne l’ignore pas. « Cette visite a eu avant tout pour objectif d’apporter le soutien de la France au processus de pacification en cours », assure-t-elle. Et du soutien, l’ancienne Hispaniola en a besoin pour parvenir à s’arracher de la violence et à la misère qui ravage Port-au-Prince et à organiser un scrutin démocratique. Les élections générales, déjà repoussées deux fois, ont été fixées au 20 novembre ; le second tour de la présidentielle devant se tenir le 3 janvier. Le vote doit mettre fin au mandat du gouvernement intérimaire au pouvoir depuis le départ en exil de l’ex-président Jean-Bertrand Aristide en février 2004.

    Après un long entretien avec le ministre français, le premier ministre Gérard Latortue s’est dit « optimiste ». Selon lui, plus de 2,7 millions d’électeurs, sur un corps électoral estimé à 4 millions de personnes, se sont inscrits. « Cela démontre l’intérêt des Haïtiens pour le vote », insiste-t-il. La baisse sensible de la criminalité, qui s’était déchaînée au printemps, a un peu redonné aux Haïtiens foi en leur avenir. Dans le centre de la capitale, au pied du palais présidentiel, où le bruit des rafales d’armes automatiques se mêlait naguère à celui du trafic automobile, la situation est redevenue presque normale. La cité Bel-Air, l’un des immenses bidonvilles qui parsèment la capitale, n’est plus tout à fait une zone de non-droit. Les Chimères, les miliciens aux ordres de l’ancien président Aristide, se font plus discrètes. Quant aux enlèvements, véritable sport national avec plus de 30 rapts par jour, ils semblent plus rares.

    Longtemps accusée de passivité coupable, déconsidérée aux yeux d’une population qui n’en attend plus rien, la force internationale des Nations unies (Minustah), avec ses quelque 7 000 hommes, a fini par se déployer en ville. Des célèbres chefs de gang qui terrorisaient la ville ont été abattus par les forces de l’ordre. Des hommes d’affaires et des politiciens corrompus ont été emprisonnés. « La violence a baissé, constate un officier de la Minustah. Les arrestations et la disparition de certains grands voyous ont eu un effet psychologique important. Cela démontre que l’impunité n’est pas une fatalité. Mais il ne faut pas se leurrer. Rien n’est gagné. Le désarmement n’a pas vraiment commencé. Les Chimères sont toujours là, maîtresses de Cité Soleil, le plus grand bidonville de Port-au-Prince. Elles peuvent ressortir », prévient-il. L’accalmie trouverait tout autant son origine dans les intérêts politiques bien compris des uns et des autres que dans le déploiement des Casques bleus.

    Sous la pression des États-Unis et du Canada, Fanmi Lavalas, le parti d’Aristide, est parvenu à s’inviter dans les élections à venir. Pour l’heure, alors que la campagne électorale n’a pas encore débuté, tous semblent décidés à jouer le jeu. « Mais si les choses ne tournent pas comme certains le souhaitent, ils pourraient être tentés de recruter des partisans parmi les milliers de déshérités pour pourrir le processus », glisse un diplomate.

    Conscient du risque, le ministre Brigitte Girardin rappelle que « seul un développement visible et global permettra de stabiliser le pays ». Haïti, l’un des pays les plus pauvres de la planète, accumule les statistiques désastreuses. L’immense majorité de la population vit dans la pauvreté absolue avec moins d’un dollar par jour. Samedi, le ministre français a annoncé la levée des sanctions européennes contre Haïti et le déblocage d’une enveloppe de 72 millions d’euros. A ce coup de pouce devraient s’ajouter dans les semaines à venir ceux du FMI et de la banque mondiale. La France, qui apporte chaque année 36 millions d’euros à l’île, a décidé d’accélérer son aide. Près d’un million d’euros a été offert pour la rentrée scolaire et 1,5 million d’euros pour lutter contre le sida. Grâce à un programme de soins soutenu par Paris et Washington, la pandémie a pu être enrayée. C’est l’une des très rares victoires de l’île ces dernières années.