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TARA DAMOCLES
mardi 30 octobre 2007, par
CONFERENCE DE PRESSE
Nous pouvons aujourd’hui grâce au projet européen Damocles et à la mission Tara Damocles, divulguer quelques faits remarquables sur l’état actuel de l’Océan Glacial Arctique en pleine transformation, leurs causes probables et leurs conséquences.
Les faits (avérés)
1/ Un recul spectaculaire de la banquise à la fin de l’été 2007 a été constaté. Entre septembre 2005 et septembre 2007 c’est plus d’1 million de km2 de glaces de mer qui ont disparu. La position initiale de la dérive transpolaire de Tara en septembre 2006 se trouvait à plus de 400 km au sud de la lisière de la glace en septembre 2007.
2/ Un accroissement tout aussi spectaculaire de la vitesse de la dérive transpolaire qui va du détroit de Béring au détroit de Fram a été constaté entre l’été 2006 et l’été 2007. Cette accélération des mouvements de la dérive transpolaire arctique, peut en partie être tenue pour responsable de la diminution de la surface couverte par la banquise à la fin de l’été 2007.
Tara a parcouru plus de 2 000 km à vol d’oiseau soit le double en tenant compte de tous les déplacements en 400 jours environ soit à une vitesse moyenne 2 fois plus élevée que ce que nous avions anticipé et 3 fois plus élevée que ce que les modèles avaient prédit. Tara sortira de l’Océan Glacial Arctique avant la fin de l’année 2007 alors que nous prévoyions cette sortie au cours de l’été 2008.
3/ La disparition progressive des glaces pluriannuelles au profit des glaces de l’année se confirme et résulte en grande partie des deux constats précédents. La station russe dérivante NP35 n’a pas pu être déployée au coeur de l’Arctique en septembre 2007, comme prévu initialement, mais à la périphérie à proximité du Cap Artichevsky par 81°30N et 103°E environ, faute de trouver de la glace pluriannuelle après avoir sillonné l’Arctique de part en part, de la Sibérie au Canada, de 100°E à 130W, et de 80°N à 89°N.
4/ Au cours de l’été 2007, on a pu constater une accumulation de glaces compactes et épaisses le long des côtes du Groenland et du Canada ainsi que dans le détroit de Fram qui ont rendu les opérations conduites à partir des brise-glace suédois (Oden), allemand (Polarstern), norvégien (Lance) très difficiles dans cette région malgré l’aide de brise-glace russes à propulsion nucléaire. Par contre et dans tout le reste de l’Arctique la navigation dans les glaces n’a présenté aucune difficulté. Lors de l’été 2007 nous pouvions rejoindre le delta de la Lena en Sibérie à celui du Mackenzie au Canada sans rencontrer un seul morceau de glace dérivante.
5/ Nous avons également constaté une amplification des flaques de fonte à la surface de la banquise qui désormais recouvrent plus de 50% de la surface de la banquise en été et une augmentation de la pluviosité dans le secteur situé entre le Groenland, le Spitsberg et le pôle nord géographique liée à des entrées d’air chaud et humide en provenance du nord de l’Europe. Les relevés de température effectués à Tara au moyen d’un ballon captif entre la surface et 2 000 m d’altitude, ont révélé la présence de masses d’air chaud à basse altitude (couche d’inversion entre 300m et 800m d’altitude).
6/ Au 15 Octobre 2007 la période de formation de la banquise n’avait pas encore véritablement commencé malgré l’arrivée de la nuit polaire. L’Océan Arctique était toujours libre de glace entre la Sibérie et le Canada.
Les causes (probables)
Les observations et les mesures collectées à Tara et aux alentours, vont nous permettre après analyse d’établir précisément les causes de certains phénomènes constatés. Les recherches sont conduites à la fois
1) dans l’atmosphère par l’analyse de plus de 100 profils de température, d’humidité et de vitesse et direction du vent entre la surface et 2000 m d’altitude complétées par des analyses au sol entre 0 et 10 m et par l’analyse du rayonnement solaire incident et réfléchi, des flux radiatifs et turbulents et de l’albédo.
2) dans la neige et la glace par l’analyse des relevés en continu des épaisseurs de glace et de neige et des caractéristiques physiques de la neige et de la glace.
3) dans l’océan par l’analyse des relevés de température et de salinité entre la surface et 1000m ou plus de profondeur effectués toutes les 48 heures.
D’ores et déjà nous avons relevé des indices forts de réchauffement des masses d’air et d’eau. Au cours des 20 dernières années, on enregistre une diminution de 1000° de température en dessous du point de congélation de l’eau de mer (-2°C) intégré sur toute la période de gel qui va de septembre à mai. Des masses d’air chaud supérieur à +10°C ont été observées cet été à Tara se déplaçant à basse altitude (400 à 800 m). La température des masses d’eau atlantique a augmenté de 0.5°C en température et de 100 m en épaisseur (entre 200 m et 800 m de profondeur).
Il s’agit non seulement d’étudier la distribution horizontale et verticale des températures mais également des caractéristiques du vent, premier responsable du mouvement des glaces de mer, de l’hygrométrie de l’air, responsable de la couverture nuageuse et des précipitations et de la salinité de l’eau de mer qui fixe le degré de congélation des eaux de mer. Tous ces paramètres sont observés, mesurés et enregistrés à Tara à fin d’analyse par les experts du consortium européen Damocles.
Les conséquences (possibles)
Bien qu’aucun modèle ne soit actuellement en mesure d’établir des prévisions fiables comme nous l’avons signalé, l’objectif principal du projet Damocles, est bien de corriger les modèles et d’améliorer la fiabilité de ces prévisions numériques, nous pouvons d’ores et déjà établir quelques prévisions surtout basées sur les récentes observations de la banquise arctique et simultanément de l’océan et de l’atmosphère qui l’environnent.
1/ Il est fort probable que la banquise arctique aura disparu en été dans les 10 à 15 années qui viennent. Au rythme actuel d’une perte de banquise de 500 000 km2 en plus chaque année en été et sachant que la surface actuelle à la fin de l’été est de l’ordre de 4 à 5 millions de km2, il suffirait donc de 8 à 10 ans pour que cette banquise d’été disparaisse.
2/ Cette disparition contribuerait à fortement augmenter l’absorption par l’océan de 80% de l’énergie solaire incidente qui, autrement, en présence de glace, serait réfléchie vers l’espace.
Ceci aurait pour conséquence de réchauffer localement l’océan superficiel et donc l’atmosphère et d’entraîner une fonte accélérée des glaces continentales du Groenland qui entraînerait une élévation du niveau de la mer de l’ordre de 1m (ou plus) d’ici la fin du siècle.
3/ Cet afflux d’eau douce vers l’Océan de part et d’autre du Groenland, aurait aussi pour conséquence majeure de ralentir la montée des eaux chaudes et salées de l’Atlantique nord vers l’Océan Arctique et donc de refroidir l’Europe Occidentale entraînant un bouleversement climatique bien au delà des régions arctiques et subarctiques.
4/ Il y a aussi nombre de conséquences géopolitiques et socio économiques à une évolution des conditions environnementales en Arctique et qui attisent la convoitise des pays riverains comme on a pu le constater cet été : ouverture de nouvelles voies maritimes entre l’Est et l’Ouest, exploitation de ressources minérales (pétrole et gaz) et vivantes (pêche), changement radical des modes de vie des populations autochtones, modification des écosystèmes etc…
COMMUNIQUE DE PRESSE 30 OCTOBRE 2007
Commentaires
1. TARA DAMOCLES, 15 novembre 2007, 11:10
Juste pour votre information,
Le festival du scoop se tient en ce moment sur Angers et une photo du TARA en 5x2m est placée sur la façade du centre des congrès.
photo magnifique du TARA pris dans les glaces sous un soleil un peu brumeux.
@+ Christophe de TRELAZE