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Le président Lula confirme à Port-au-Prince l’aide du Brésil à la reconstruction de Haïti

vendredi 20 août 2004, par Visiteur

Le Monde 20 août 2004

Résultat sans surprise, mercredi 18 août à Port-au-Prince, où la sélection brésilienne de football a battu, par 6 buts à zéro, l’équipe nationale haïtienne lors d’un "match pour la paix"auquel assistait le président Luiz Inacio Lula da Silva.

Plus de 15 000 spectateurs enthousiastes se pressaient au stade Sylvio-Cator, refait pour l’occasion grâce à des fonds taïwanais. A la différence des autres pays de la région, où le base-ball domine, le football est le sport roi en Haïti.

De strictes mesures de sécurité avaient été prises autour du stade, protégé par près de 1 000 militaires brésiliens. Les autorités avaient d’abord annoncé que les billets seraient distribués en échange d’armes illégales. L’idée a été finalement abandonnée pour ne pas favoriser les membres des gangs armés.

"Le véritable nom de la paix, c’est la justice sociale", a souligné le président Lula à son arrivée à Port-au-Prince. Il venait de Saint-Domingue où il avait assisté à la prestation de serment du président dominicain Leonel Fernandez et proposé aux pays d’Amérique centrale et des Caraïbes de s’associer au Mercosur, la zone de libre-échange du sud des Amériques.

Le Brésil a pris la tête de la mission des Nations unies déployée en Haïti après le départ en exil de l’ancien président, Jean-Bertrand Aristide. Mille deux cents casques bleus brésiliens constituent le plus gros contingent de cette force de maintien de la paix largement sud-américaine, placée sous le commandement du général brésilien Augusto Heleno Ribeiro.

Malgré les réticences de certains membres de son Parti des travailleurs (PT), sensibles aux arguments du président déchu, qui continue d’affirmer, depuis son exil sud-africain, qu’il a été victime d’un "complot fomenté par les Etats-Unis et la France", Lula a relevé le défi de la reconstruction d’Haïti et entraîné dans son sillage plusieurs grands pays sud-américains.

"L’Amérique latine a une responsabilité à laquelle elle ne peut se soustraire en Haïti. Nous voulons un monde solidaire car, sans solidarité, les crises, les injustices et le chaos se multiplient", avait ainsi expliqué le président du Chili, Ricardo Lagos, venu, à la fin juillet, en Haïti où est déployé, également, un contingent chilien. A son tour, le président argentin Nestor Kirchner est attendu, en octobre, en Haïti, où se trouvent plus de 600 casques bleus de son pays.

Accueillie avec enthousiasme par les Haïtiens, fanatiques du ballon rond et de ses stars brésiliennes, la diplomatie du football sert les aspirations du Brésil, qui vise un siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. En s’engageant en Haïti, Lula et ses associés du Mercosur entendent montrer qu’ils peuvent réussir là où les Etats-Unis et les "pays amis" européens ont échoué, après l’intervention militaire de 1994, qui avait ramené Jean-Bertrand Aristide au pouvoir.

Pour consolider la démocratie et inverser la spirale du désastre économique et social, Haïti a besoin des crédits promis par les grands bailleurs de fonds. Ils se sont engagés, en juillet, à verser plus de 1,4 milliard de dollars, mais les décaissements se font au compte-gouttes.

Non moins préoccupant est le message que les autorités haïtiennes viennent de transmettre en acquittant l’ancien responsable d’un groupe paramilitaire, Louis-Jodel Chamblain, accusé de multiples violations des droits de l’homme. Ce leader des anciens militaires rebelles qui ont porté l’estocade à Jean-Bertrand Aristide, en février, et n’ont toujours pas déposé leurs armes, est impliqué dans l’assassinat, en 1993, d’Antoine Izméry, un commerçant proche de l’ancien président.

Amnesty International et plusieurs organisations haïtiennes de défense des droits de l’homme ont dénoncé ce procès expédié en quelques heures comme une "parodie de justice" montrant que le gouvernement ne voulait pas en finir avec l’impunité.

Jean-Michel Caroit