Accueil > Société > Drogue chez les marins pêcheurs ?

Drogue chez les marins pêcheurs ?

22 février 2007, par Admin

MARIN pêcheur et junkie, l’association peut paraître incongrue. Et pourtant, c’est une réalité que constatent chaque jour armateurs, médecins des gens de mer et gendarmes maritimes : les drogues dures sont désormais installées à bord des navires de pêche et ont envahi le quotidien d’un des métiers les plus durs au monde. Sans le moindre contrôle...

.../...Le docteur Christine Latimier, addictologue à Lorient (Morbihan), soigne huit marins pêcheurs sur les 600 toxicomanes qu’elle reçoit en consultation. Un chiffre qui pourrait être beaucoup plus élevé : « Si on avait des horaires adaptés à ce métier hors norme, on en verrait plus », dit-elle.

« J’ai un patron de pêche qui donne son Subutex à son matelot quand ils sont en mer ! Il y avait même un injecteur d’héroïne à bord d’un bateau... » En outre, selon un armateur, « les enfants de pêcheurs prennent moins la suite de leur père et on voit des marginaux, anciens taulards, toxicos urbains, venir faire le métier ».

.../...« Il est sûr qu’il y a un problème, mais c’est très délicat. Ce métier accumule les facteurs de risque... », souligne le docteur Philippe Paris, des Affaires maritimes du Guilvinec.

../...En cas d’accident du travail, les Affaires maritimes ne se pressent pas pour faire des prélèvements sur les équipages. Georges Tourret dirige l’Institut maritime de prévention, chargé de la prévention d’accidents : « Il n’y a aucun dépistage systématique de l’alcoolisme ou de la toxicomanie. » Un laxisme qui tranche avec les multiples contrôles en vigueur dans l’aviation ou le transport routier...

L’administration commence toutefois à prendre conscience du problème. Le docteur Féraud :« Il est temps que ce métier grandisse, après vingt ans de fortunes de mer sans enquêtes judiciaires, affirme-t-il. Le monde maritime est comme une famille qui découvre un enfant drogué : il est sidéré, inhibé, il a honte, il nie la réalité. »

Dans les placards du ministère des Transports dorment depuis des lustres des milliers d’affiches en couleur portant la mention « Drogue à bord, danger de mort ». Elles n’ont jamais été distribuées.

De notre envoyé spécial au Guilvinec, Concarneau et Lorient
JEAN-MICHEL BADER. Le Figaro 22/O2/2007