Diminuer les cotisations sociales ?
4 commentairesLe système solidaire de la Sécu est basé sur le principe que chacun y cotise selon ses moyens et en bénéficie selon ses besoins.
La question de l’augmentation des salaires est une des premières préoccupations des Français. Alors que les syndicats réclament le retour à une indexation des salaires sur l’inflation, supprimée sous le premier septennat de Mitterrand, les gouvernements successifs depuis cette époque ont multiplié les mécanismes permettant d’échapper aux cotisations sociales (primes, intéressement, participation, etc.).
Les programmes des partis de droite et d’extrême-droite, relayant les demandes du MEDEF, proposent d’augmenter les salaires en diminuant les cotisations sociales.
Pour contrer ce qui apparaît comme une idée de bon sens, il faut expliquer que les cotisations sociales sont une partie du salaire, appelée salaire socialisé, qui est versée à la Sécurité sociale pour assurer un certain nombre de prestations. Et cette partie de notre salaire inclut la part des cotisations dite salariée mais aussi celle dite patronale.
Cette dénomination apporte une confusion et a été créée pour que le patronat puisse se glorifier de participer à l’effort de protection sociale et lui permet de demander un allègement de sa part qu’il désigne comme des « charges ». Mais la totalité de cet argent correspond à l’ensemble de ce que verse le patron pour acheter la force de travail du salarié.
D’ailleurs aux États-Unis, c’est le cas et c’est au salarié de se payer son assurance santé ainsi qu’un fonds de pension pour sa retraite. Alors proposer le tour de passe-passe de transférer une partie de la rémunération d’une ligne à l’autre sur la fiche de paye est une escroquerie qui peut être qualifiée de vol.
Car si les sommes versées à la Sécurité sociale diminuent, il faudra que les salariés prennent une assurance pour compenser ce qui ne sera plus pris en charge par la Sécu. Or, le coût de cette assurance risque fort d’être plus élevé pour la même couverture.
Pour résumer, il s’agit de se débarrasser de la Sécurité sociale comme le réclamait il y a quelques années un des dirigeants du patronat issu du monde des assurances. L’autre élément à prendre en compte est le fait que le système solidaire de la Sécu est basé sur le principe que chacun y cotise selon ses moyens et en bénéficie selon ses besoins.
Dans le monde de l’assurance, il n’en va pas de même : le niveau des prestations est directement lié au montant de la prime versée.
Attention donc à ne pas tomber dans le piège des sirènes libérales.
Si nous voulons une Sécurité sociale qui réponde à nos besoins, il faut à la fois augmenter les salaires, donc les cotisations sociales, y compris en augmentant leur niveau. Pour reprendre la comparaison avec les États-Unis, nous avons de la marge car les dépenses de santé représentent en France 12 % du PIB et plus de 17 % aux États-Unis.
Du point de vue économique, la soutenabilité n’est pas la question, ce qui compte est qui collecte et gère cet argent : la bonne solution est que ce soit la Sécu en intégralité tant pour la collecte que pour le paiement. Ce d’autant que ses frais de gestion sont très 4 à 5 fois inférieurs à ceux des assurances et qu’elle ne verse pas de dividendes à des actionnaires.
Christophe Prudhomme Médecin au Samu 93 9 octobre 2023
Vos commentaires
# Le 10 octobre 2023 à 12:13, par Anita
article à la portée d’un élève de cinquième (s’il sait lire...).
et des neuneus tout fiers de travailler (ou FAIRE travailler) au black parce qu’ils ne payent pas de cotisations sociales !
# Le 10 octobre 2023 à 14:38, par Scherrer
Voilà qui est clairement expliqué
# Le 10 octobre 2023 à 16:25
Excellentes précisions qui expliquent bien que les cotisations sociales ne sont pas des CHARGES ,comme certains le claironnent ,mais bien un salaire différé a inclure dans la rémunération global du travail fourni . jvk
# Le 10 octobre 2023 à 19:46, par Olivier, encore en bonne santé...
“comme” le réclamait il y a quelques années un des dirigeants du patronat issu du monde des assurances.”
Le fameux Denis Kessler (président de la FFSA de 1990 à 2002 ET D.G. d’AXA 1997-98, puis président du C.A. de SCOR (sté de réassurance ou assureur des assurances) qui, avec F. Ewald, posent ensemble les pierres angulaires d’une rénovation politico-idéologique du patronat. Leur innovation, c’est de penser le risque non plus comme une prérogative de l’entrepreneur justifiant le profit, mais en l’étendant à la société tout entière », une vision qui inspire largement les discours d’Ernest-Antoine Seillière distinguant « “riscophiles” et “riscophobes” », selon le magazine Marianne.
Il a fort heureusement fini de nuire en cassant sa pipe, elle-même bien assurée !
Sinon, pour 2024, camarades salariés, attendez-vous à des augmentations de vos assurances santé complémentaires d’entreprise OBLIGATOIRES de l’ordre de 5%, voire plus de 10 pour les contrats individuels* (après celle de cette année de 4,1%), avec, pour prétexte fallacieux, "les transferts de charge de l’état" (comprendre la présentation du budget de la sécu -le fameux PLFSS), pour la bagatelle de 1,3Md €...pour des remboursements tellement faméliques que vous pourrez vous enorgueillir d’engraisser votre assureur...
Et bonne santé à tou(te)s !
* Les complémentaires santé envisagent des hausses de cotisations d’ampleur pour 2024