J’ai assisté en ce début de semaine à Groix à deux conférences qui m’auront laissé des souvenirs contrastés.

La première, lundi, de Jo Le Port, sur la toponymie de l’île de Groix : nous étions trop nombreux pour être installés comme prévu dans la salle du Presbytère. Qu’à cela ne tienne, le Recteur nous a invités à nous replier sur l’église, où nous fûmes plus à l’aise pour écouter notre conférencier. Pendant près de deux heures, celui-ci nous a déployé la grande fresque historique de l’île à travers les noms de ses villages et leur évolution et nous a régalés de sa faconde, de son érudition et de sa modestie. S’appuyant sur les travaux de chercheurs renommés (Léon Fleuriot, Bernard Tanguy) et sur une récente publication de Pierre Hollocou et Jean-Yves Plourin (Toponymie bretonne et patrimoine linguistique, Edit. Emgleo Breizh,2014), Jo a entr’ouvert, pour notre plus grand plaisir, ce gros cahier d’histoire qu’il ne cesse d’enrichir depuis son passage chez les "quatre bras" (pour les non-initiés, c’était le surnom donné aux enseignants de l’école des Frères). Chacun est retourné chez soi ravi, convaincu d’avoir beaucoup appris sur l’histoire de l’île et admiratif du savoir accumulé par Jo Le Port qui ne se départit pas pour autant de la simplicité et de l’humilité que chacun lui reconnaît .

La seconde conférence a eu lieu mardi soir à l’Ecomusée. Michel Perrin, conférencier habitué du lieu, y parlait de "la pêche et les pêcheurs de Groix durant la deuxième guerre mondiale". Présenté avec révérence par le président de la SAMG et la conservatrice de l’écomusée, l’orateur, diplômé de l’Université, s’affranchissant de toute référence à des travaux de ses pairs (en particulier l’ouvrage fondateur de Jean-Christophe Fichou, sur "les pêcheurs bretons durant la Seconde Guerre mondiale", PUR, 2009), nous a beaucoup parlé des bateaux groisillons détruits ou endommagés par les bombardiers anglais et américains (les aviateurs US étant affublés du titre de "cow-boys"), mais peu des marins et point de pêche et de poisson : aucune donnée sur les quantités pêchées et leur répartition, les ports de débarquement, la transformation des poissons,...
Et comment peut-on parler d’un tel sujet sans exposer les démarches des conserveurs allant à la rencontre de l’occupant dès Juillet 1940, les accords Maud/Manaud, les modalités du transfert de l’armement Tristan/Calloch à Hennebont après la réquisition de la Pointe de Kéroman par les Allemands pour la construction de la base sous-marine, la création de la Corporation des Pêches Maritimes, le classement en V-Betrieb des industries de transformation du poisson, le régime des inscrits maritimes par rapport aux réquisitions de main d’oeuvre et ses enjeux au moment de l’instauration du STO, les procédures engagées à la Libération (Jury d’Honneur, Profits Illicites)...
Bref, cette conférence était un addendum à l’article de son auteur dans le cahier de l’île de Groix N°5 sur "les mille et vingt armateurs de l’île de Groix", mais nous a peu éclairés sur le sujet annoncé.

Régis Leclercq