"Anita, de Groix"

"Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire"

Dossier dragage Le Marin (1.11)

Publié le 15 novembre 2013 à 21:20

« ROBIN DES BOIS ATTEND UN RENFORCEMENT DES NORMES ET DES CONTRÔLES »

Charlotte Nithart est porte-parole de l’association Robin des Bois qui entend faire durcir la réglementation en matière de dragage et de clapage.
- Depuis quand Robin des Bois s’intéresse à la problématique des dragages et clapages ? Quel a été l’élément déclencheur ?

Robin des Bois n’a jamais compris pourquoi l’immersion de 300 000 tonnes de vases polluées était considérée comme une pratique raisonnable alors que le naufrage d’un tanker trans portant 300 000 tonnes apparaîtrait comme une catastrophe. L’association a toujours considéré que les vases portuaires sont des déchets et qu’elles devaient être gérées comme tels. En 1993, l’association a mené une campagne contre l’immersion de 220 000 m3 de vase des bassins du port militaire de Cherbourg lourdement contaminées par le complexe industriel de construction et de réparation navale, en particulier par les PCB. Les actions ont été menées sur le plan juridique par des recours devant le tribunal administratif, sur le terrain terrestre et maritime par un déversement de vases devant la préfecture maritime et l’abordage d’une barge d’immersion. Et 2 ans plus tard, Robin des Bois a publié un rapport de synthèse intitulé Dragage : la marée des déchets, faisant le point sur la réglementation, les contaminations et les pratiques des ports.

Sur quels textes vous appuyez-vous principalement aujourd’hui pour faire entendre la voix des protecteurs de l’environnement ?

Au niveau international, nous nous référons principalement à la convention Ospar pour la protection de l’Atlantique du nord-est et ses lignes directrices pour la gestion des matériaux de dragage ainsi que sur les meilleures pratiques des États membres qui, comme la Belgique, s’orientent de plus en plus vers des dépôts à terre et des recyclages. Nous nous appuyons sur les dispositions concernant le contenu des études d’impacts (R 122-5 du code de l’Environnement), le contenu de la demande d’autorisation (R 214-6) et, le cas échéant, le contenu du document d’évaluation des incidences Natura 2000 (Directive Habitats). Nous avons fait évoluer le corpus réglementaire et, depuis 2006, il y a des niveaux de référence relatifs aux métaux lourds (arrêté 6 août 2006), aux PCB et au TBT (arrêté du 23 décembre 2009) et aux HAP (8 février 2013). Robin des Bois se réfère également aux réglementations relatives aux seuils de contamination des produits de la mer et aux dispositions imposant une interdiction de la commercialisation en cas de dépassements des seuils et des réductions à la source des contaminants. Enfin, nous nous appuyons sur la réglementation relative à l’information des citoyens et nous devons fréquemment en faire appel à la Commission d’accès aux documents administratifs pour avoir copie des études d’impact ou de suivi.

Quelles sont vos attentes en matière d’évolution de la réglementation en France ?

Robin des Bois attend en premier lieu un renforcement des normes et des contrôles pour réduire à la source la charge contaminante des sédiments de dragage. Nous attendons avec impatience là publication du nouvel arrêté seuil PCB attendu avant la fin de l’année. Malheureusement, les premiers seuils soumis à consultation par l’Ifremer ont soulevé un tollé de la part des opérateurs qui les considéraient comme trop exigeants. Nous nous orientons donc vers des « seuils temporaires » plus sévères que les niveaux actuels mais moins que ce que la sécurité sanitaire et la protection de l’environnement ne l’exigent.

Et à plus court terme ?

D’ici la fin 2013 également, nous attendons la publication des dispositions réglementaires sur le stockage monospécifique à terre des boues de dragage et de curage des ports et voies d’eau et du protocole d’évaluation du critère H14 visant à caractériser l’écotoxicité d’un déchet et à déterminer son caractère dangereux ou non dangereux. À court terme, il est nécessaire selon Robin des Bois d’élargir la réglementation Geode à d’autres substances comme les composés bromés et de définir des seuils azote et phosphore sur les littoraux les plus soumis aux algues vertes. De plus, nous remarquons que l’opinion publique et les pêcheurs professionnels sont de plus en plus opposés à l’immersion. Ce renversement progressif de la tendance va forcer les pouvoirs publics à innover réglementairement et les ports à innover techniquement.

Bruno SAUSSIER

Dangerosité des sédiments immergés

Un protocole doit être mis en place pour évaluer la dangerosité des sédiments. Il est basé sur cinq niveaux de contamination.
Le code de l’Environnement ne permet pas aujourd’hui de trancher sur la dangerosité des sédiments.

Malgré la profusion de textes réglementant l’immersion ou le stockage à terre des sédiments issus du dragage, le code de l’Environnement (article R 541-8), ne permet pas de trancher aisément du caractère dangereux ou non de sédiments destinés à un stockage à terre. La dernière avancée en la matière date de 2013.
Cinq ans plus tôt, un groupe de travail (1) a été créé par le ministère de l’Écologie, de l’Énergie et du Développement durable, pour définir un protocole permettant de ’quantifier l’écotoxicologie des sédiments marins ou continentaux destinés à une gestion à terre.
La législation européenne compte 15 critères (H1 à H15) pour l’évaluation du caractère dangereux ou non-dangereux des déchets. Le critère H14 concerne l’écotoxicité, ce que la Commission européenne définissait ainsi en 2008 : « Un déchet qui présente ou peut présenter des risques immédiats ou différés pour une ou plusieurs composantes de l’environnement. » Pour le ministère de l’Environnement, il était donc primordial de connaître les modalités selon lesquelles pouvait être déterminée la dangerosité des sédiments destinés à une gestion à terre en ce qui concerne le critère H14.
Se basant sur les cinq niveaux de contamination fixés par l’arrêté du 9 août 2006, le protocole est déclenché dès le seuil S1 franchi pour au moins un des paramètres chimiques (2). Véritable outil d’aide à la décision, le protocole H14 se déroule de la façon suivante : après centrifugation, les sédiments sont soumis à deux essais biologiques de toxicité aiguë, puis un essai de toxicité chronique. Si l’un de ces trois essais dépasse la valeur seuil, le sédiment est automatiquement classé écotoxique. Dans le cas contraire, les essais se poursuivent sur deux végétaux terrestres pour en étudier l’effet sur la germination et la croissance. Si aucun des paramètres ne dépasse la valeur seuil, il est classé non-écotoxique.
Publié en janvier dernier, le rapport d’étude du Bureau de recherches géologiques et minières fixe le protocole sans toutefois considérer le cadre dans lequel il sera appliqué. Les rédacteurs eux-mêmes confient ne pas savoir à quel moment le protocole H14 interviendra dans le processus.
Une certitude cependant : en procédant aux mesures de HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques, classé dans la liste des polluants prioritaires par l’OMS, la Communauté européenne et l’Environmental Protection Agency) dans les sédiments marins, il anticipe une très probable future réglementation.
Bruno SAUSSIER
(1) Il associe les scientifiques du Cetmef, d’lneris, du Cémagref, de l’lfremer et du BRGM à Voies navigables de France, au port de Paris, au grand port maritime de Nantes, à EDF et au groupe Géode.
(2) Si fait référence à des valeurs plutôt déterminées sur base écotoxicologique alors que N1 et N2 résultent principalement de traitement statistique de données physico-chimiques.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.
Les commentaires non signés (nom ou pseudo) ne seront pas validés !

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
(Pour créer des paragraphes laissez simplement des lignes vides.)

L'agenda d'Henri
Webcam sur Port Tudy
Météo - Marée
Derniers commentaires :
Archives
Liens :
Autres sites amis :
Secours