"Anita, de Groix"

"Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire"

MANIFESTE POUR LES ÃŽLES

Publié le 21 juillet 2009 à 14:09

Grenelle de la mer
de Bruno NOURY
Maire de l’Ile d’Yeu

A l’attention de M. BORLOO
Ministre de l’Écologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer.
A l’issue du Grenelle de la mer, force est de constater qu’un pan essentiel de la politique de la mer a tout simplement été occulté. Les îles côtières métropolitaines n’ont pas été intégrées dans les propositions des groupes de travail.
Pourtant, sur les îles, les problématiques du littoral sont exacerbées. L’insularité, par la complexité sociale, économique, environnementale et culturelle exige des solutions politiques d’envergure pour pallier ces
handicaps structurels. Si, en revanche, les autres territoires ultramarins ont été mis très légitimement au coeur de ce Grenelle, les îles côtières métropolitaines en ont été les grandes absentes.
Comment a-t’on pu oublier que l’insularité entrave l’éducation et la formation professionnelle ? Quid de l’égalité des chances pour un îlien ? Pourquoi n’a-t’on pas ainsi évoqué des expériences comme le
collège des îles du Ponant dispensant les cours pour les enfants des petites îles de l’atlantique ? On aurait dû pointer l’urgence dans ce Grenelle, d’installer le très haut débit sur les îles pour que puissent se
développer les systèmes de "visioconférence" et l’économie numérique.
Comment a-t’on pu oublier les problématiques particulières de santé publique et d’accès aux soins pour les îles ? Comment assurer le maintien de personnel médical sur place ? Quid de la gestion du
handicap sur les îles ?
A-t’on seulement imaginé le coût et les contraintes générés par les visites chez un spécialiste sur le continent ? L’urgence de la mise en place de la télémédecine sur les îles implique l’installation du très haut
débit.
Pourquoi le droit aux évacuations sanitaires dans les îles n’a-t’il pas été énoncé ? Savez-vous seulement, monsieur le ministre, que dans le cas précis de l’Ile d’Yeu, vous êtes responsable de la remise en cause de notre propre système d’évacuations sanitaires (« évasan ») alors que, partout ailleurs en France, il est assuré ?
Que penser de l’oubli d’aborder le droit au déplacement des îliens ? Des politiques d’accessibilité et de désenclavement des îles ? De la continuité territoriale qui n’existe pas à l’heure actuelle pour les îles dans le droit français.
Le maintien de la population des 15 000 habitants des îles de l’Atlantique et de la Manche aurait dû être un postulat !
Comment vivre aujourd’hui sur une île quand le logement coûte plus cher ? Chaque île développe des solutions innovantes dans les politiques foncières. L’exiguïté et l’attrait de nos territoires imposent des
politiques à très long terme en urbanisme. Pourquoi n’en a-t-on pas parlé ?

Comment vivre sur une île quand les salaires sont moins élevés que sur le continent et que tout coûte plus cher ? Par exemple, les îles ont le triste privilège d’avoir l’essence et le fuel domestique le plus cher de
France.
Comment vivre sur une île quand il devient trop onéreux pour les parents des insulaires de venir voir
leur famille ? Habiter une île, c’est accepter de devoir payer à chaque fois pour seulement aller ailleurs : voir
sa famille, se soigner, effectuer un déplacement sportif ou culturel, bref se déplacer.
Comment vivre sur une île quand l’accès aux services publics devient difficile voire impossible ?
Pourquoi n’a-t’on pas parlé de développement économique sur les îles ? La problématique de la logistique condamne les économies insulaires à un rayonnement local. Le principe de concurrence équitable pour aider les entreprises insulaires dans l’accès aux marchés continentaux aurait dû être adopté.
Le maintien des activités primaires : pêche et agriculture, sur les îles, où les possibilités de reconversion sont limitées auraient dû être posé. Si nous ne sommes plus légitimes à pêcher sur les îles personne ne l’est !
Pourtant, L’Ile d’Yeu, dernière petite île européenne de moins de 5 000 habitants, qui a su garder une pêche structurée avec une criée, s’est vue à plusieurs reprises directement visée par les politiques des pêches :
- interdiction du filet maillant dérivant à thon, dont chacun s’accorde à dénoncer aujourd’hui l’absurdité ;
- menaces sur la pêcherie de requin taupe dont les islais sont les derniers pêcheurs en Europe ;
- absence de prise en compte de la reconversion de la part de l’Etat après l’arrêt du filet maillant dérivant qui condamne les
pêcheurs de l’île à un accès à la ressource le plus limité de France.

Pourquoi n’a-t’on pas mis en avant les écosystèmes préservés des îles, loin des pollutions
continentales ? Les îles disposent d’une richesse exceptionnelle en faune et en flore, aussi bien à terre
qu’en mer. Chaque île dispose de son chapelet d’espèces endémiques. _ Des réflexions sur l’implantation de
laboratoire de biodiversité sur les îles auraient dues être à l’agenda du Grenelle de l’environnement. Il
s’agissait déjà d’un enjeu national. Le Grenelle de la mer n’en fait pas mention non plus. Pourtant, les îles
cumulent les règlements (ZNIEZZ, Natura 2000, site classé, parc marin, loi littorale, etc…) et demanderaient
des approches éco-systémiques.
L’importance de la gestion des déchets sur les îles ne méritait-elle pas qu’on s’y arrête ? Allez-vous continuer de seulement survoler ces problématiques cruciales pour les îles ?
Pourquoi les politiques de l’eau et de l’assainissement sur les îles n’ont-elles pas été soulignées ?
Comment a-t’on pu oublier de parler de capacité d’accueil sur les îles ? Comment gérer les afflux
touristiques estivaux ?
Pourquoi attend-on toujours à Yeu le droit des collectivités à l’expérimentation que nous avons
demandé il y a maintenant deux ans ?
Pour rappel, il s’agissait d’ d’instaurer une taxe additionnelle au prix du passage des véhicules à l’instar de ce
qui existe déjà pour les passagers afin de financer notre réseau de transport en commun et ainsi lutter contre
l’envahissement des véhicules l’été. Il s’agissait aussi de se doter de moyens pour financer la mise en place
de véhicules propres.
Quelle meilleure zone pour tester d’autres types d’énergie qu’une île, où le parc de véhicules est captif
et où il suffit de n’équiper qu’une seule station service ? Pourquoi cette question n’est-elle toujours
pas traitée alors que le président de la République lui-même, dans son discours de clôture du grenelle de
l’environnement disait :
" Il appartiendra, par exemple, aux collectivités de librement décider de créer des péages urbains ...Et celles
qui voudraient aller plus loin pourront demander une loi d’expérimentation".
Nous sommes la première commune de France à demander un droit à l’expérimentation. Nous avons fait cette
demande un mois avant le discours du président de la République, notre demande à transité de commission
post Grenelle en ministères. Où sont donc passées ces propositions dans ce Grenelle de la mer ?
Par ailleurs, on le sait bien, les sites potentiels pour les énergies marines sont notamment autour des îles.
L’enjeu pour les insulaires est aussi de viser l’autonomie énergétique.
Le grenelle de la mer qui développe cette idée pour la Réunion doit être étendue à toutes les îles, chacune
avec ses propres spécificités.
Les îles, laboratoires et vitrines des politiques publiques, sont une alternative majeure au tout tourisme. Les
enjeux industriels français en la matière sont d’ordres mondiaux. _ D’autres pays européens l’ont bien compris
et il suffit de citer le cas de l’île de Samsoe, vitrine du développement durable danois.
Le groupe de travail 4 a débattu des questions de gouvernance. _ Pourquoi les problématiques spécifiques
des communes insulaires dans la réforme des collectivités locales ne sont-elles pas apparues ?
Comment réaliser des intercommunalités sur certaines îles éloignées du continent disposant d’une
seule commune ? L’urbanisme des îles doit-il vraiment être géré depuis le continent ? Le meilleur niveau
de gouvernance pour une île, c’est souvent l’île elle-même.
La subsidiarité ne doit-elle pas s’appliquer pour les îles ?
Les îles qui ne disposent pas d’intercommunalité perdent environ 80 € par habitant et par an de dotation de
l’état alors que, pour elles aussi, tout coûte plus cher que sur le continent (30 % sur les investissements pour
l’Ile d’Yeu). La commune se doit souvent suréquiper sans pouvoir mutualiser avec d’autres. La dotation
globale de fonctionnement des communes insulaires devrait être légitimement abondée pour tenir compte de
ces spécificités. L’Ile d’Yeu doit-elle se diviser en deux communes et réaliser une intercommunalité
pour bénéficier des dotations qui s’y rattachent ? Puis demander à fusionner en une seule entité dans
le cadre de la réforme des institutions et bénéficier de nouvelles dotations ?
Comment le groupe de travail 4 qui a développé l’idée de "l’archipel France" a-t-il pu omettre les îles
dans ses réflexions ?
Le groupe de travail 3 avait pour thème "partager la passion de la mer" avec la question "comment faire venir
la mer à l’intérieur du pays ?". Pourquoi n’a-t’on pas pensé aux îles ?
Qui ne connaît pas Ouessant, Belle-Ile, Sein, Groix, Molène, Aix, Arz, Ile aux moines, Houat Hoëdic,
Yeu, Batz, Bréhat, Chausey, Les Glénan ? Ces bouts de terre au milieu de l’océan évoquent à tous les
continentaux une part de rêve et de mystère. Leur notoriété a fait le tour du monde. Quels meilleurs endroits
symbolisent mieux "la mer" pour les Français ?
Seulement, aujourd’hui, les îles se réduisent à l’image d’Epinal ou à l’exotisme des traversées. Leur image est
pourtant copieusement utilisée aujourd’hui comme vecteur de publicité pour les littoraux continentaux.
Les territoires insulaires ne sont-ils pas l’archétype du titre même du groupe de travail 1 "La délicate
rencontre entre la terre et la mer" ?

Comment a-t’on pu oublier le travail de l’association des Iles du ponant, qui existe depuis 40 ans et
défend toutes ces thématiques insulaires. ? Comment a-t’on pu négliger 40 ans de travail politique ?
Pourquoi le président de l’association des îles du ponant n’a-t-il pas été convié dans les groupes de
travail nationaux ?
Enfin, comment a-t’on pu négliger les engagements internationaux de la France, notamment le traité de
Lisbonne qui stipule " une attention particulière est accordée aux […] régions qui souffrent de
handicaps naturels ou démographiques graves et permanents telles que les régions […] insulaires" ?
Les îles n’ont pas été intégrées dans le dispositif du zonage AFR (aides à finalité régionale) alors que l’union
européenne demandait que les îles de moins de 5 000 habitants y soient.
Les enjeux du développement durable sur les îles sont des enjeux nationaux. Les îles auraient dû être, à
l’instar des territoires d’outre mer, la clé de voûte du Grenelle de la mer, être au coeur de la plupart des
propositions.
Il aurait fallu poser les problématiques insulaires comme l’égalité des chances, l’accès à la santé ou le droit au
développement. Il s’agissait d’équité républicaine et de solidarité nationale. Bref, il était question des valeurs
même de notre démocratie française, de diminuer la fracture territoriale !
La loi sur la montagne a permis de mettre en valeur la culture montagnarde et d’aider le désenclavement. A
l’heure du Grenelle de la mer, une loi pour les îles aurait été de bon aloi.
Les insulaires doivent-ils se contenter d’être des citoyens de seconde zone ?
Vous avez dit en ouverture de ce grenelle de la mer : "la mer sauvera la terre" ; je vous réponds oui, mais le
salut viendra des îles !
Je crains qu’il ne soit plus possible de réintégrer l’ensemble des réflexions insulaires dans les propositions des
groupes de travail. Tout au plus sera-t-il fait mention des îles dans le rapport final. Ni complètement littorales,
ni complètement ultramarines, les îles côtières métropolitaines sont-elles condamnées à rester noyées
dans les limbes du Grenelle de la mer ? L’ensemble des problématiques spécifiques des îles ne
laissait pourtant pas la place à l’oubli. Serait-il possible que l’on nous ait simplement ignorés ?
Sachez entendre, Monsieur le ministre, la juste mesure de ma perplexité.
Bruno NOURY
Le Maire de l’Ile d’Yeu
Vice Président de l’Association des Iles du Ponant

Commentaires :

  • Ce qui est sympa avec Mme Ménard, c’est qu’elle excuse toujours Eric, le maire ! Quoiqu’il fasse, ou ne fasse pas ou qu’il dise ou ne dise pas ! C’est cela l’amour aveugle !!!

  • c’est tellement con comme comme commentaire que, même pas signé, je le valide ...
    ainsi, chacun jugera de la pertinence des avis de certains anonymes :-((.
    Celui-ci est gratiné, un message parle de l’Ile d’Yeu, il trouve le moyen d’en appeler le maire Eric !!!!!
    AM

  • C’est peut-être le deuxième prénom du maire......de l’ile d’Yeu !

  • En tous cas c’est rassurant de voir l’AIP prendre une position car jusqu’à présent ça roupillait sec dans cette structure !

    Claude à Belle-Île.

  • Désolée, ce n’est pas l’AIP mais Bruno Noury maire de l’Ile d’Yeu :-((
    AM

  • Bravo, monsieur le Maire ... OLIVE

  • Désolé Anita , c’est bien le logo de l’AIP dont Bruno Noury est vice Président.

    Claude.

  • toutes nos excuses : erreur d’illustration

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