Un matin de printemps, au lever du soleil, le téléphone sonne :" Madame
Mahé, deux de vos ânes sont sur la route du Bourg avec leur collier." La
bonne nouvelle c’est que ce ne sont pas mes ânes : ils ne restent pas au
pré avec leur licol. La mauvaise c’est que ce sont les ânes d’une amie
donc j’irai donner un coup de main. J’appelle l’amie en question.

On ne peut pas dire que mon coup de fil à 6H du matin la transporte de joie mais elle arrive, me dit-elle.

Pendant ce temps, le téléphone continue à sonner :"Madame Mahé, vous
avez deux ânes sur la route. Ils s’en vont vers l’Apéritif. Il y a un
cheval avec eux." Diable ! cela se complique ! Voilà que ces effrontés
sont allés débaucher un cousin !

Au moment où la propriétaires des ânes arrive à la maison, le
téléphone sonne une dernière fois. C’est Rachel. "Zabeth, tu sais que tu
as deux ânes sur la route, avec un cheval et une drôle de bête. Ils s’en
vont vers port Mélite". Et elle raccroche, la bougresse. Mais qu’est-ce
qu’elle entend par "drôle de bête" ?

Tandis que nous quadrillons les routes de Primiture, l’heure est à
d’intenses réflexions. Nous éliminons d’office le chameau ou le
dromadaire éventuellement oubliés par un cirque. Il n’en n’ait pas passé
sur Groix depuis quelques années déjà.Il y a bien un émeu aux Grands
Sables mais pour quelle raison aurait-il suivi deux ânes et un cheval ?

Alors que nous retournons vers le Bourg, deux gendarmes, debout à côté
de leur voiture, nous font de grands signes. Nous nous arrêtons. Ils ne
sont pas peu fiers : "Venez ! On a réussi à les faire entrer dans un
terrain clos et on a bloqué l’entrée. On a tout le monde : les deux
ânes, le cheval et une drôle de bête... On pense que c’est une mule." Et
ils ont raison ma foi, il y a dans le champ une magnifique mule.

Tandis que nous parlons, une voiture s’arrête. C’est Martine : " Bonjour,
ça vous ennuierait d’aller chercher l’ânesse qui est au milieu de la
route à 5OM de là. Il y a un sacré embouteillage derrière elle."

Nous nous regardons, hésitants. "Ah non, disent les gendarmes, cette
fois-ci c’est votre tour !" Je décide d’y aller à pied. Une grande
ânesse arrive face à moi. Elle marche, paisible, au milieu de la route.
Manifestement, elle est pleine et son énorme ventre se balance doucement.
Je me place à côté d’elle et passe mon foulard autour de son cou en
guise de licol. Je la pousse doucement sur le bas-côté. Les voitures nous
dépassent au pas tandis que nous allons rejoindre les
autres........................................Elizabeth Mahé